dimanche 20 octobre 2013

Une semaine sous l'eau

Voilà bien longtemps que je n'avais pas écrit. Au début, c'est facile, on ne connait personne, on est trop fatiguée pour sortir et tout est nouveau et fascinant. Mais très vite, les choses changent, on rencontre des gens, on se fait des amis, on s'étonne moins de tout ce qui nous entoure et de ce fait, on est moins prompt à passer du temps devant l'ordinateur pour écrire un blog.

Mais me revoilà, avec une histoire à vous raconter, celle des inondations.
Alors que sur un coup de tête un vendredi soir, nous décidons de partir à Phnom Penh pour passer le week-end, la mousson s'accélère à Kratie.
A notre retour, le dimanche soir, les principales rues du centre ville sont inondées. L'eau monte jusqu'à 15-20cm, rien de méchant mais quand même, ça fait bizarre.
Dans notre rue, tout le début et toute la fin sont sous l'eau.
Notre rue, côté gauche
Vue de notre balcon
Notre rue, côté droit
A certains endroits, l'eau monte beaucoup plus haut. Le lendemain, après une nuit entière de pluies, le niveau de l'eau s'est encore élevé. Jusqu'à venir devant notre maison. Le mercredi, il y a plus d'un mètre d'eau dans notre rue, bien plus à certains endroits. Nous travaillons de la maison jeudi et vendredi, la moto ne pouvant plus circuler sans que l'on noie le moteur. L'eau vient maintenant lécher notre portail et nos voisins d'en face ont évacué leur maison.
Dans l'eau flotte indifféremment, sacs plastiques, branches, tongues, rats, feuilles, tissus et ordures. Des enfants, eux, nagent au milieu de tout ça.
L'eau est sombre, sale et un peu inquiétante quand il faut la traverser. J'ai apporté des bottes de pluie, mais comme l'eau nous arrive à mi-cuisses, elles ne servent finalement qu'à ne pas toucher directement les « objets » non identifiés sous l'eau. Et c'est déjà très utile.
Le Mékong, lui, semble déborder et ne plus pouvoir contenir les pluies torrentielles.
Les gens se déplacent maintenant en bateau dans la rue.



Et si la vidéo ne marche pas, voilà le lien youtube! 
http://www.youtube.com/watch?v=Gd-K42ZKeFE&feature=youtu.b

Mais le plus impressionnant finalement, ce n'est pas l'eau qui monte à une vitesse affolante, ni les pluies incessantes, mais les khmers eux-mêmes. Les cambodgiens sont d'une sérénité, d'un pragmatisme et d'un calme déconcertants face aux événements. Tout sourire, comme à leur habitude.
« La moto ne passe plus, on vient de noyer le moteur ? Ce n'est pas grave, on l'abandonne là et on prend la barque.
On a jusqu'à 50 cm d'eau au rez-de-chaussée ? Ce n'est pas grave, on met les meubles sur des briques, puis on monte au premier étage.
Les enfants ne peuvent pas aller à l'école ? Ce n'est pas grave, ils peuvent toujours jouer et nager dans l'eau croupie.
Et puis avec toute l'eau qu'il y a, on peut laver la voiture, le vélo, la moto qui ne marche plus, sa vaisselle, et même ses cheveux et ses aisselles (véridique!). De quoi se plaint-on ? Impeccable ! De l'eau gratos ! »

Bref, une belle leçon de relativisme et de lucidité ; à quoi cela sert-il de s'exciter et de s'affoler ? On ne peut pas arrêter la pluie … Et puis cela pourrait être pire, on pourrait être sous le régime de Pol Pot. Certes.
C'est là que je réalise que, oui, parfois, je manque de perspectives, je ne vois que l'eau qui monte.

Le lundi suivant, les rues sont sèches et le niveau du Mékong est redescendu de 5 mètres comme par magie. Des inondations, il ne restera finalement qu'un petit trait fait au crayon sur les maisons pour indiquer leur hauteur cette année, et des ordures à déblayer, partout.

1 commentaire:

  1. Très intéressant ton article Julie ! On est à Kratie là, et on peine à imaginer la ville sous l'eau ! Incroyable ce calme impassible dont font preuve les habitants, ce sont de belles leçons pour nous, occidentaux excités et stressés ! Bises. Anne et Benjamin

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